De Nanni Moretti (2001, Italie) 1 h 39 (en vost fr)
Ouverture des portes à 19 h 15. Séance à 19 h 30
Avec Nanni Moretti, Laura Morante, Jasmine Trinca, Guiseppe Sanfelice
Le quotidien de Giovanni Sermonti (Nanni Moretti) psychanalyste à Ancône (Italie), alterne entre le mal-être de ses patients et une vie familiale épanouie. A la mort accidentelle de son fils Andrea, cet arrangement avec l'existence est rompu. L'unité familiale se disloque, le couple est en difficulté et le praticien se retrouve incapable de bien exercer son métier. Il faut dire qu'il est hanté par la culpabilité d'avoir accepté en ce dimanche fatal de se rendre chez un patient en détresse, renonçant à un jogging avec son fils, qui lui aurait épargné un accident de plongée dramatique.
Clair-obscur. Dans "La Chambre du fils", Nanni Moretti revient à un cinéma de fiction qui lui sert à traiter d'un sujet intime et douloureux: la mort d'un proche, en l'occurrence celle d'un enfant, et les conséquences du deuil sur la famille, sur le quotidien de chacun.
Le film surprend par la rupture brutale que l'auteur introduit avec la veine autobiographique de ses deux films précédents ("Aprile", "Un journal intime") et par le choix d'un registre dramatique et de portée existentielle jamais explorés jusque-là.
Quoique très douloureux, "La Chambre du fils" n'est pas lui même d'essence morbide. La vie reprend ses droits, chacun poursuit son histoire vaille que vaille, les flash-backs rappellent les trajectoires inexorables du destin. Rien n'arrête pourtant le quotidien, illustrant qu'il existe toujours, qu'on le veuille ou non, la possibilité d'un regain de vie, de rencontre, d'espoir encore.
Charles-Edouard Woissellin. Passionné de cinéma depuis toujours, il intervient comme médiateur culturel. Il est le créateur du podcast Cinécure et exerce comme journaliste cinéma et réalisateur. Après quinze années passées entre Florence, Paris, Barcelone et Madrid, il s'est de nouveau rapproché de Bordeaux.
L'héritier. Nanni Moretti est considéré comme l’héritier traditionnel du cinéma italien, avec son style fait d’humour et de sensibilité, qui fait écho aux illustres prédécesseurs, comme Fellini ou Antonioni, a reconnu en préambule Charles-Edouard Woisselin, spécialiste du cinéma transalpin.
Dans “La Chambre du fils” Moretti explore des thèmes difficiles comme le deuil, la famille et la perte d’un être cher. Le film est ancré dans la réalité italienne : une ville moyenne - Ancone -, un notable de province, psychiatre installé, au centre d'une famille équilibrée.. Un quotidien italien qui d’emblée ne ferait pas un film original. Mais pourtant, Nanni Moretti sape subtilement cette paisible dynamique familiale, en basculant dans le drame, en l’occurrence la mort accidentelle du fils.
Fragmentations. La figure du père, « élément moteur » est petit à petit déconstruite. A l’image de cette famille provinciale « bourgeoise », qui se fissure. Au rythme d’une mise en scène structurée, mais fragmentée à dessein par des retours en arrière, le psychiatre « perd pied », rongé par la culpabilité, accablé d’avoir perdu - non seulement un fils par sa faute involontaire - mais aussi toutes ses certitudes professionnelles.
Le scénario traite fort justement les questions psychologiques et sociales sur fond de tradition familiale. Les personnages sous la conduite de Nanni Moretti, - derrière et devant la caméra -, se meuvent entre tendresse, doute et douleur.
Palme d'or. Trois ans après "Aprile", présenté au festival de Cannes en 1998, sept ans après "Journal intime" qui obtint le prix de la mise en scène en 1994, "la Chambre du fils" apporte à Nanni Moretti la Palme d'or du festival de Cannes 2001.


Humanité. Pour ajouter un sens profond à « La Chambre du fils » - épicentre du drame -, l’irruption d’une amie du jeune disparu, va permettre à la vie de reprendre le dessus. Ainsi que le reconnait Charles-Edouard Woisselin, le film « finit dans un rire collectif », laissant toutefois au spectateur la libre interprétation du devenir familial. Avec l’idée sous-jacente que la vie vaut malgré tout la peine d’être vécue. Ce film poignant, humain « sans être larmoyant », illustre la virtuosité et le travail tout en précision du réalisateur, justement récompensé en 2001 au Festival de Cannes. Il souligne enfin la place prééminente que tient Nanni Moretti dans le cinéma italien. Un hommage reconnaissant rendu par le Ciné-club du Bassin.
