La Chambre du fils

Mercredi 29 octobre, Espace Brémontier à Arès

De Nanni Moretti (2001, Italie) 1 h 39 (en vost fr)

Ouverture des portes à 19 h 15. Séance à 19 h 30

 

Avec  Nanni Moretti, Laura Morante, Jasmine Trinca, Guiseppe Sanfelice

Le quotidien de Giovanni Sermonti (Nanni Moretti) psychanalyste à Ancône (Italie), alterne entre le mal-être de ses patients et une vie familiale épanouie. A la mort accidentelle de son fils Andrea, cet arrangement avec l'existence est rompu. L'unité familiale se disloque, le couple est en difficulté et le praticien se retrouve incapable de bien exercer son métier. Il faut dire qu'il est hanté par la culpabilité d'avoir accepté en ce dimanche fatal de se rendre chez un patient en détresse, renonçant à un jogging avec son fils, qui lui aurait épargné un accident de plongée dramatique.

Clair-obscur. Dans "La Chambre du fils", Nanni Moretti revient à un cinéma de fiction qui lui sert à traiter d'un sujet intime et douloureux: la mort d'un proche, en l'occurrence celle d'un enfant, et les conséquences du deuil sur la famille, sur le quotidien de chacun.

Le film surprend par la rupture brutale que l'auteur introduit avec la veine autobiographique de ses deux  films précédents ("Aprile", "Un journal intime") et par le choix d'un registre dramatique et de portée existentielle jamais explorés jusque-là.

Quoique très douloureux, "La Chambre du fils" n'est pas  lui même d'essence morbide. La vie reprend ses droits, chacun poursuit son histoire vaille que vaille, les flash-backs rappellent les trajectoires inexorables du destin. Rien n'arrête pourtant le quotidien, illustrant qu'il existe toujours, qu'on le veuille ou non, la possibilité d'un regain de vie, de rencontre, d'espoir encore. 


Rencontre avec...

Charles-Edouard Woissellin. Passionné de cinéma depuis toujours, il intervient comme médiateur culturel. Il est  le créateur du podcast Cinécure et  exerce comme  journaliste cinéma et  réalisateur. Après quinze années passées entre Florence, Paris, Barcelone et Madrid, il  s'est de nouveau rapproché  de Bordeaux.


La  (grande) soirée

L'héritier. Nanni Moretti est considéré comme l’héritier traditionnel du cinéma italien,  avec  son style fait d’humour et de sensibilité, qui fait écho aux illustres prédécesseurs, comme Fellini ou Antonioni,  a reconnu  en préambule Charles-Edouard Woisselin, spécialiste  du cinéma transalpin. 

Dans “La Chambre du fils” Moretti explore des thèmes difficiles comme le deuil, la famille et la perte d’un être cher. Le film est ancré dans la réalité italienne : une ville moyenne - Ancone -,  un notable de province, psychiatre installé, au centre d'une famille équilibrée.. Un quotidien italien qui d’emblée ne ferait pas un film original.  Mais pourtant, Nanni Moretti sape subtilement cette paisible dynamique familiale, en basculant dans le drame, en l’occurrence la mort accidentelle du fils.

 Fragmentations. La figure du père, « élément moteur » est petit à petit déconstruite. A l’image de cette famille provinciale « bourgeoise », qui se fissure.  Au rythme d’une mise en scène structurée, mais fragmentée à dessein par des retours en arrière,  le psychiatre  « perd pied », rongé par la culpabilité,  accablé d’avoir perdu - non seulement un fils par sa faute involontaire  - mais aussi toutes ses certitudes professionnelles.

Le scénario traite fort justement les questions psychologiques et sociales sur fond de tradition familiale.  Les personnages sous la conduite de Nanni  Moretti, - derrière et devant la caméra -, se meuvent  entre tendresse, doute et douleur. 


Bande annonce


Palme d'or. Trois ans après "Aprile", présenté au festival de Cannes en 1998, sept ans après "Journal intime" qui obtint le prix de la mise en scène en 1994, "la Chambre du fils" apporte à Nanni Moretti la Palme d'or du festival de Cannes 2001.

Nanni Moretti et Guiseppe Sanfelice, père et fils
Nanni Moretti et Guiseppe Sanfelice, père et fils

En revue

La Dépêche du Bassin, octobre 2025
La Dépêche du Bassin, octobre 2025

Humanité. Pour ajouter un  sens profond à « La Chambre du fils » - épicentre du drame -, l’irruption d’une amie  du jeune disparu, va permettre à la vie de reprendre le dessus. Ainsi que le reconnait Charles-Edouard Woisselin, le film « finit dans  un rire collectif », laissant toutefois au spectateur la  libre interprétation du devenir familial.  Avec l’idée sous-jacente que la vie vaut malgré tout la peine d’être vécue.  Ce film poignant,  humain « sans être larmoyant », illustre la virtuosité et le travail  tout en précision du réalisateur, justement récompensé en 2001 au Festival de Cannes.  Il souligne enfin la place prééminente que tient Nanni Moretti dans le cinéma italien. Un  hommage reconnaissant rendu par le Ciné-club du Bassin.

n-loui
Charles-Edouard Woisselin pendant le débat aussi animé que passionnant. Photos Jean-louis Burési